On est tous l'étranger de quelqu'un
Je crois que je commence à trop tirer sur la corde. Mon corps ne suit plus.
J'ai beau avoir 20 ans 21 ans, se coucher tous les soirs à 3h du matin, il y a un moment où c'est plus possible.
Comme ce matin, quand il vient me réveiller à 8h46 parce que ce samedi, c'est moi qui le garde.
J'ai essayé de rester encore un peu au lit. Parce que de toute façon, j'arrivais même pas à ouvrir les yeux. Et puis, il a fallu se résigner, repousser la couette. Je ne me suis même pas changé hier soir, je suis encore en maillot sous mon short.
Pourquoi je me suis couchée aussi tard ? D'abord, parce que lui et moi on se "voit" qu'une fois par jour, à partir de 23h-00h heure française alors, j'en profite.
Et puis à 01h, je me suis rappelée que je n'avais pas fini de lire Les enfants de la liberté, de Marc Lévy.
On est tous l'étranger de quelqu'un.
" Jeannot, tu leur diras de raconter notre histoire, dans leur monde libre. Que nous nous sommes battus pour eux. Tu leur apprendras que rien ne compte plus sur cette terre que cette putain de liberté capable de se soumettre au plus offrant. Tu leur diras aussi que cette grande salope aime l'amour des hommes, et que toujours elle échappera à ceux qui veulent l'emprisonner, qu'elle ira toujours donner la victoire à celui qui la respecte sans jamais espérer la garder dans son lit. Dis-leur Jeannot, dis-leur de raconter tout cela de ma part, avec leurs mots à eux, ceux de leur époque. Les miens ne sont faits que des accents de mon pays, du sang que j'ai dans la bouche et sur les mains. "
Alors, j'ai commencé à lire. En sachant pertinemment que je n'arrêterais de lire que lorsqu'il n'y aura plus de lettres devant mes yeux. Je me suis laissée entraîner par cette brigade, du temps de la résistance. J'ai vibré avec eux, j'ai eu peur, j'ai pas pleuré mais j'aurais pu. Pourtant, tout est annoncé dès le début, peu de personnages vont survivre. Mais on a quand même toujours un espoir. La libération est proche.
Une fois ce livre terminé, j'ai eu besoin d'une présence, comme souvent quand je termine un livre (le dernier en date, c'était L'arche L'enfantde Noé (Merci Lulu ) d'Eric Emmanuel Schmitt, que je lui ai lu ) même si il termine plutôt bien.
Alors, je l'ai appelé. A 3h du matin, sans grand espoir qu'il réponde. Déjà qu'il répond pas dans la journée. Alors en pleine nuit. Mais peut-être que j'ai espéré si fort qu'il l'a ressenti, de l'autre côté de la Méditerrannée ? Toujours est-il qu'il a décroché. Que sa voix me fait du bien, surtout quand elle n'est pas deformée par le micro. Comme j'aime entendre son souffle. Et le sentir s'endormir. 8 minutes tout pile. Mais ça m'a fait du bien. J'ai pu m'endormir, le coeur léger, apaisée.
Edité le 01 juin à 23h39